Frank Davidson

« S’il y a une piste cyclable, lʼannée prochaine, je vais à Moscou à vélo ! »

Cette déclaration, Frank Davidson, mort le 20 février, à l’âge de 95 ans, me l’avait répétée à l’été 1996, ajoutant, « je ne sais comment faire pour créer une piste cyclable ».
Me fondant sur mon expérience de la planification régionale, je lui avais dit savoir à peu près comment procéder.
A quoi il a répondu, avec lʼesprit entreprenant américain : « chiche ! ».

Franck-Davidson

En octobre de cette année, association CycloTransEurope était née, avec le projet dʼune piste cyclable unissant les grandes capitales européennes. J’en étais le président, Mélanie Erhardy (qui a dessiné notre logo, et dont le mari Joseph est l’auteur de la sculpture spectaculaire en bronze représentant une cycliste dont le vélo est chargé, sur la roue avant, d’un plateau de fruits et légumes, qui orne le forum de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise), la secrétaire. Frank en assurait le financement de départ, jusqu’à ce qu’un financement régulier puisse être assuré. Frank, né je crois à New York, s’était engagé au début de la guerre comme volontaire dans l’armée canadienne, même avant je crois que se constitue l’armée américaine. Comme officier, il avait participé au débarquement en Normandie, non pas le 6 juin, mais dès le 19 juin 1944, et il en était très fier. Chaque année, pour les cérémonies commémoratives, il était au premier rang pour accueillir les vétérans.

Quelques années après la guerre, il avait épousé Izaline Dol, d’une famille protestante française, et partageait son temps entre les Etats-Unis et la France.
Quoique juriste et non ingénieur, appartenant à la célèbre université Massachusetts Institute of Technology (MIT), toujours plein d’idées, il avait favorisé la promotion à la fois de toute une série de « grands projets », dont quelques uns se sont réalisés, mais dont d’autres continuent à être du domaine du rêve (tunnel sous la Manche dans les années 50 et 60, transmission de courant électrique par micro-ondes depuis des satellites à destination de pays pauvres et isolés, trains se propulsant dans des tunnels sous vide avec sustentation magnétique à des vitesses fantastiques, structures financières et techniques pouvant intervenir rapidement dans le monde en cas de catastrophes naturelles, guerres ou épidémies, port artificiel, aéroport, zone franche etpolders à créer à Gaza en Palestine), la liste en est longue et variée.

Il disait toujours que la genèse de projets de ce genre avait souvent été française. En 2006, avec Kathleen Lust Brooke, il avait publié un gros ouvrage en deux volumes « Building the World » retraçant la genèse de grands projets mondiaux (les Pyramides, le grand canal de Chine, les aqueducs romains, les ponts mobiles de Charlemagne, les canaux de Suez et Panama, la Tour Eiffel…).

sculpture.joseph.erhardie

Dès 1997, il avait contribué à organiser la première randonnée de CTE sur notre futur itinéraire en Ile de France. En janvier 1998, il a assisté à notre première réunion d’importance, où sʼétaient rendus quatre Belges venant de Bruxelles ou Namur, avec lesquels nous avons décidé du futur tracé depuis Paris. Ce tracé, reconnu par le Schéma National des Véloroutes et des Voies vertes de décembre 1998, avec son prolongement vers lʼEspagne, est devenu celui du projet Eurovélo EV3 en France, conformément à nos choix.

Cʼest à lʼinitiative de Frank Davidson que nous devons notre particularité, longtemps maintenue, dʼavoir été la seule association, et non une collectivité publique, sʼoccupant de la promotion dʼune grande voie cyclable en France. Je salue ici sa mémoire.

Philippe Bernard

21 février 2014

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